Mon atelier de peintre

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CARNET DE VOYAGES DE MON ARRIERE ARRIERE GRAND PERE Chapitre 2

 

 

Madras, Grovenor Hôtel, 21 mai 1868

 

Première représentation à Madras, avec Dave Carson.

Salle comble, grand succès

 

 

 

Calcutta, 29 juillet 1868

 

A mesure que nous approchons de Calcutta, les deux rives se rapprochant, la vue est magnifique, la campagne superbe, l'arrivée à Calcutta est splendide.

Il faut avoir vu cette innombrable quantité de navires pour alors se faire une idée.

On arrive avec le steamer jusqu'au centre de la ville, malheureusement un orage nous a accueillis à notre arrivée et la pluie nous a interceptés.

Nous descendons au Spence's Hôtel.

Première représentation le 8 août à Town Hall, salle pleine

 

 

 

Calcutta

 

 

 

J'ai assisté vendredi dernier à l'un des concerts populaires qui se donnent tous les quinze jours à la salle du théâtre italien.

4 ouvertures exécutées par trois violons, un violoncelle, une contrebasse et un piano.

Tel est le grand orchestre de Calcutta! Un signor "Villa", ténor qui possède quelques notes aïgues assez perçantes et de longs cheveux qui lui pendent sur les épaules, une signora "Mazucco", chignon étourdissant, voix de contralto assez remarquable.

La salle du théâtre est assez convenable, des pankas (grands éventails) donnent de l'air toute la soirée au parquet où les dames vont, mais ceux qui sont à la galerie doivent être gênés pour voir la scène avec ce sytème.

Calcutta, entre autres merveilles, possède une Lady Mistriss Every. Cette dame, que je ne connais pas même de vue, touche du piano beaucoup mieux que Vhalberg, joue de l'orgue à faire pâlir Lefébure-Vély.

Il faut que je dise quelques mots de la compagnie dont je fais partie :

 

Dave Carson, directeur responsable, petit homme bien pris, figure intelligente et rusée, cheveux noirs, frisés et un peu crépus, détestant les anglais en sa qualité d'américain (il est de New-York).

C'est un homme impitoyable en affaires, mais quand on est convenu d'une chose avec lui et quand il a donné sa parole, il la tient religieusement, ne faisant que ce qu'il doit faire strictement, mais le faisant grandement, largement, mu par humanité ou par bonté d'âme, ainsi il sert ses propres intérêts, au reste avec nous toujours très convenable et d'une grande politesse. Pour ma part, je n'ai qu'à me louer de lui, il m'a obligé et que cela ait été pour lui même ou pour moi, je ne lui en suis pas moins grè.

Comme artiste, il a beaucoup de talent, et aurait sans nul doute fait un comique de premier ordre à Paris même.

 

Monsieur Burton régisseur et associé de Dave Carson, anglais de naissance mais non de caractère, excellent homme de coeur, serviable, malheureusement un peu enclin aux "pegs" (apéritifs) mais on n'est pas parfait. Il chante avec goût et phrase très bien. J'aime beaucoup cet homme là et il était digne d'un meilleur sort que de maître anglais.

 

Monsieur Parker 1er violon de la compagnie, anglais pur sang, cheveux blonds, petits yeux toujours inquiets, grande bouche souriant toujours faux et laissant voir de formidables dents larges comme des touches de piano, ton commun, démarche grotesque, petits pas et tortillant les hanches jouant du violon...A l'anglaise et organisé pour la musique comme...Un anglais ! (je ne peux pas trouver d'autre comparaison).

 

Monsieur Southam, danseur et chanteur comique. De la verve de l'entrain comme artiste une voix extraordinaire, il monte comme une femme jusqu'à l'ut aïgue que ne donnent pas toutes nos chanteuses. Avec cela une voix de baryton qui aurait été belle avec le travail,mais pas musicien du tout et chantant de routine.

 

Calcutta Spence's Hôtel 4 octobre 1868

 

Nous sommes partis de Calcutta, nous sommes arrivés à Jamalpore à Reid's Family Hôtel.

Nous avons joué le soi même au théâtre Royal.

Nous arrivons le mardi matin à Monghyr par le chemin de fer.

 

 

(une gare de l'époque comme celle-ci où mon aïeul a du attendre le train...)

 

7 miles seulement séparent les deux villes. Monghyr est une ancienne ville qui était fortifiée d'une manière formidable à en juger par ce qui reste des fortifications. Le Gange passe près de la ville.

Nous quittons Jamalpore et nous arrivons à Bankipore, nous jouons le soir même.

Bankipore est la première ville de l'Inde où j'ai vu des cheminées. Les mois de décembre, janvier et février sont parait-il très froids.

 

A Dinatore on s'est introduit dans notre loge par la fenêtre et le 10 au matin on a ouvert la petite malle: on a volé un jupon, des bracelets en buffle qui venaient de Cocanada et mes bottines de concert; les robes de Mélanie étaient jetées par terre, heureusement que les voleurs n'ont pas eu le temps de fouiller partout, les bijoux de Mélanie étaient dans la poche de sa robe. Dave Carson et Franck sont arrivés au théâtre et ont pris un des voleurs.

Toujours salle comble.


Nous quittons Dinatore après la représentation. Nous soupons à la gare et à 2 h 45 du matin nous partons pour Bénarès, où nous arrivons à 9h.

En descendant de chemin de fer, il faut traverser le Gange en bateau pour aller dans la ville.

 

 

Nous arrivons à Victoria Hôtel et nous prenons une voiture pour aller visiter la ville, qui est ancienne.

Nous mettons pied à terre dans le bazar qui est fort curieux et fort animé; Au moment où nous arrivions, un éléphant monté par un hindou traversait la place. 

Nous avions déjà aperçu un convoi d'éléphants dans la campagne un peu avant d'arriver à Bénarès.

Du bazar nous avons été visiter plusieurs temples indous, du moins visiter ce que l'on en peut voir car on ne vous laisse pas entrer dans l'intérieur.

Ils sont tous fort beaux et très curieux, il y en a un dont le dôme est entièrement doré.

Dans les vestibules sont des statues et des bas-reliefs représentant les dieux indiens. 

La plupart avec un corps humain, des bras, quatre, six, huit et une tête d'éléphant.

Il y a aussi un grand nombre de pierres coniques de différentes grandeurs et couleurs.

Chacune de ces pierres est enchâssée dans un cercle de fer, dont un côté au lieu de se fermer, s'allonge comme un soufflet

Ces pierres à ce qu'il parait représentent les parties naturelles de l'homme et sont adorées par les naturels. 

On en voit dans presque toutes les rues de la ville indienne.

Le morceau de fer dans lequel elles sont enchâssées et la pierre elle-même sont toujours humides d'une huile qui infecte. Ils jettent aussi des fleurs sur ces pierres.

les instruments qui servent pour les cérémonies sont des tam-tams, des espèces de tambours allongés que l'on frappe par les deux bouts et des timbales immenses.

Nous avons vu ces instruments au grand temple, là où nous sommes allés sur le bord du Gange, à l'endroit où les natifs brûlent leurs morts.

Il y avait trois cadavres, deux dont tout le corps drapé dans une étoffe blanche baignaientt entièrement dans le fleuve sacré et le troisième était déjà mort sur le bûcher, car il avait autant de bois dessus que dessous.

Un natif commençait à raser la tête de l'un des cadavres qui paraissait être celui d'un homme de trente, trente cinq ans au plus, tout en le laissant baigner dans le fleuve.

La place d'où nous regardions ces préparatifs était une espèce de plateforme élevée, où deux petits monuments en pierre rappelaient qu'à cette même place une femme s'était brûlée volontairement à la mort de son mari ainsi que la religion le commande.

Tout autour sont des temples de différentes formes et grandeurs, mais tous d'une construction étrange pour nous.

Nous avons quitté les bords du Gange en quittant un escalier de pierre, raide comme une échelle, et nous sommes arrivés à une grande mosquée, dont les deux minarets dominent toute la ville.

Nous sommes montés dans l'un de ces minarets celui de droite en entrant. Un escalier de pierre fort étroit et en vis, conduit au sommet d'où l'on a une vue splendide, qui vous récompense des fatigues de la montée.

 

 

Un grand nombre de jolies perruches vertes, bleues, jaunes, roses, voltigeaient tout autour de nous et venaient se poser sur le minaret qui nous faisait face.

Après cette visite nous avons traversé la ville, indienne en grande partie. Ville fort étrange, aux rues étroites, où l'on peut parfois à peine passer à deux de front.

Toutes les rues sont dallées et à chaque instant il faut monter ou descendre des marches de pierre ou des pentes fort rapides.

Partout on trouve des petits temples et les pierres coniques, dont j'ai parlé plus haut.

Ce sont sans doute les dieux lares, des natifs. Nous avons repris notre voiture au bazar.

Nous voulions aller voir le palais des singes, qui est dit-on fort curieux par la grande quantité de ces animaux qu'il renferme, mais la nuit était venue et force nous a été de rentrer à l'hôtel et de remettre cette visite à un autre jour.

Aujourd'hui lundi 12 octobre nous jouons pour la première fois à Bénarès.

 

 

Fin du chapitre 2...A suivre



26/08/2012
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